Les règlements édictés par les Fédérations Sportives
( Prérogatives de puissance publique ou Activités économiques
) : Compétence juridictionnelle
En Droit français
En droit français, il existe une particularité relative
à l' exercice de l' activité sportive qui n' est pas
sans poser problème dans le cadre du droit de la concurrence.
L' organisation de la pratique de l' activité sportive
est en effet considérée en droit Français comme une
véritable activité de service publique (Loi du 16 Juillet
1984 modifiée). La Loi reconnaît aux fédérations sportives
un monopole dans chaque discipline ainsi qu' une mission
de service public. Les actes des fédérations pris dans
ce cadre constituent des prérogatives de puissance
publique excluant l' application de l' ordonnance de
1986 et par là même les compétences et du Conseil de
la concurrence et des tribunaux de Droit privé" au
profit de ceux de "Droit public".
Cependant, même si les fédérations mettent souvent
en avant l' exercice de leur mission de service publique
pour échapper à l' application du droit de la concurrence,
il n' en demeure pas moins que celles-ci exercent souvent
de véritables activités économiques dont l' importante
n' est pas négligeable. La jurisprudence et notamment
le conseil de la concurrence recourent donc à la théorie
de l' acte détachable afin de contrecarrer l' argument
des PPP. .
Affaires : ADIDAS
En Droit communautaire
Le Droit européen s' applique aux Entreprises, entendues
comme activités économiques. Lors d' une décision du
27 OCT 1992 "Coupe du monde de Football 90", la commission
à pu préciser que la coupe du monde comportait des
activités économiques ( vente de billets, publicité,
exploitation d' emblèmes et vente de droits de retransmission
TV). De même à t' elle reconnu le caractère d' Entreprise
aux différents acteurs sportifs tels que les fédérations
et les comités organisateurs. La CJCE dans la célèbre
affaire Bosman 1995 à également affirmé que le sport
constituait une activité économique. Le droit communautaire
ne tient donc pas compte des problèmes franco français
et réactionnaires que constituent les PPP.
déc. Comm. Du 27 Octobre 1992 (Coupe du monde de Football
90) JOCE n°L326/31 et affaire Bosman
Les problèmes liés à la vente de billets
Les Ententes anticoncurrentielles
L'exclusivité accordé par l'organisateur d'une manifestation
à un distributeur Les organisateurs d' évènements sportifs
ont tendance à conclure des accords d' exclusivité
avec une seule agence dans chaque Etat membre en lui
réservant le monopole de la vente des billets d' entrée.
Ce qui peut être considéré comme une entente anticoncurrentielle
si cela vient à écarter du marché d' autres distributeurs
ou moyens de distribution.
Dans certains cas, la vente des tickets d' accès peut
s' accompagner de la vente de prestations de voyage
tels que transport et hébergement, la manifestation
sportive fait donc dans ce cas partie d' un produit
touristique. Une telle pratique n' est anticoncurrentielle
que si les opérateurs choisis bénéficient d' une exclusivité.
C' est la position qu' à adopté la commission dans
l' affaire "coupe du monde 90".En l' occurrence, la
FIFA (organisateur) avait confié à une seule agence
italienne ad hoc l' exclusivité mondiale de la vente
des billets de la Coupe du Monde 90 , incluant dans
le forfait, le transport et l'hébergement. Ce qui restreignait
la concurrence entre voyagistes car les autres agences
n'avaient pas l'autorisation d'acquérir les billets
concernés.
déc. Comm. du 27 Octobre 1992 (Coupe du monde de Football
90) JOCE n°L 326/31; réponse à question écrite : n°E-1815/98,
11 Juin 1998. JOCE C13/132, 18 janv. 1999; réponse
à question écrite : n°E-0029/98, 29 janv. 1998. JOCE
C223; réponse à question écrite N° 3480/95 JOCE C137,
8 mai 96.
- Mais qu'en est-il si le distributeur est un Mandataire
indépendant ?
La Commission considère que les contrats conclus avec
des mandataires échappent au droit de la concurrence,
car le mandataire n'apparaît pas comme un véritable
acteur économique. Il agit au nom et pour le compte
de son mandant et suit les instructions qui lui sont
données. Dès lors le recours à un tel mandataire exclusif
n'a pas pour effet de restreindre la concurrence. Toutefois,
la commission recherche si le prétendu mandataire n'est
pas en réalité un véritable distributeur indépendant.
Ce qui était le cas dans l'affaire "coupe du monde
90".
déc. Comm. JOCE n°L 2921, 24 déc. 1962
- L'argument de la sécurité des spectateurs tient-il
pour justifier le recours à un distributeur exclusif
?
La commission reste prudente sur cet argument et à
considéré que lors de la coupe du monde 90, cela ne
justifiait pas le recours a un voyagiste exclusif.
Le besoin de séparer les spectateurs par nationalité
et de garantir la sécurité peut être satisfait par
un autre moyen. En l'occurrence, le recours à un réseau
de distribution sélective à condition que les critères
en soient qualitatifs et justifiés ( v. affaire Metro CJCE, 25 oct.77: Rec. CJCE, p. 1875
)
Les Abus de Position Dominante
Le fait qu'un organisateur d'une manifestation sportive
internationale ( la FIFA dans l'affaire "Coupe du monde
90" ), en situation de monopole, oblige les spectateurs
à n'acheter les billets seulement que dans leur pays
respectif n'a-t-il pas pour effet de cloisonner le
marché européen? Ne peut-on pas y voir là un Abus de
Position Dominante de la part de l'organisateur?
Problèmes liés à la vente des droits de retransmission
TV des évènements sportifs
la question de l' exclusivité de retransmission
L' exclusivité accordée aux chaînes TV par pays n'
est pas en soi source de difficultés La durée et la
portée de l' exclusivité accordée peut en revanche
affecter le libre jeu du marché. Pour la Commission,
l' exclusivité doit être limitée a des contrats spécifiques,
ou à une manifestation particulière ou couvrant une
seule saison sportive.
Le vrai problème de concurrence se pose en effet ici
entre les chaînes TV, qui se battent pour l' obtention
de ces droits exclusifs, le danger étant, que de grandes
chaînes ou de grands groupes de chaînes ne trustent
le marché (Notamment en achetant à long terme tous
les droits sur un sport précis..) empêchant les autres
chaînes de pouvoir diffuser ces programmes. Récemment,
en sport automobile, le magazine "the economist" a
soulevé une affaire de ce type en révélant la cession
par la "FIA" des droits de retransmission en F1 à une
société commerciale pour 100 ans et moyennant un prix
dérisoire
déc. Comm. 15 sept 1989 JOCE L 284, 3oct 1989; déc.
Comm. 31 janv. 1995 (Tiercé Ladbroke) JOCE n°L 221,
19 sept. 1995
Le problème des discriminations entre chaînes de télévision
L' UER qui gère l' Eurovision achète collectivement
les droits aux organisateurs pour ses membres ( en
principe des chaînes publiques européennes), et garantit
ainsi à ses membres des tarifs négociés et avantageux
Or,
les chaînes non membres se plaignent de ce système
dont elles sont exclues. Pour la commission, ce système
est bel et bien de nature à restreindre la concurrence
et à affecter le commerce entre Etats membres (1993:EUROSPORT/
Screenspot), ouvrant donc l' application de l' art
85. L' achat des droits par les non-membres doit se
faire à des conditions raisonnables.
déc. Comm., 11 /06/ 1993, IV/32/150(UER c/ Système
eurovision)JOCE n°L179, 22/ 07/93
La question de l' APD des fédérations sportives en
matière de retransmission d' évènements sportifs étrangers
Principalement en matière de football, l' UEFA, prévoit
dans ses statuts que les fédérations possèdent les
droits de retransmission des matchs qu' elles organisent
et qu' au niveau des matchs de coupe d' Europe, ceux-ci
appartiennent aux clubs !
Or, selon l' art 14 des statuts de l' UEFA, celle ci
peut subordonner la retransmission transfrontalière
de matchs à son autorisation ou à celle des fédérations
de l' Etat récepteur.
Le but de ce système étant d' éviter que la télédiffusion
ne coïncide avec des matchs locaux importants, favorisant
ainsi la fréquentation des stades !
Cet article 14 est contesté par certains organismes
de TV d' autant qu' il limite la possibilité pour les
fédérations de vendre librement leurs droits de retransmission.
Toute la question repose ici sur la nécessité et l'
efficacité de cette pratique dans l' optique d' augmenter
la fréquentation des stades, sachant que bien qu' anticoncurrentielle,
celle ci peut avoir un intérêt pratique et un effet
économique positif.
Les problèmes liés aux équipementiers sportifs
les parrainages exclusifs
Le fait pour une Fédération sportive de conclure un
accord d'exclusivité avec un équipementier sportif
afin que ce dernier soit son seul fournisseur, n'est-il
pas constitutif d'une entente anticoncurrentielle faite
au détriment d'autres fournisseurs potentiels ?
La réponse négative l'emporte car l'exclusivité en
elle-même ne cause aucun problème. Seules sont sanctionnables
les conditions d'octroie de l'exclusivité. Tous les
fournisseurs potentiels doivent pouvoir présenter leur
candidatures.
C'est ainsi que sont sanctionnées, l'absence d'appel
d'offre et ou une durée d'exclusivité trop longue.
affaire ADIDAS
Mais qu'en est-il d'une exclusivité accordée selon
un critère financier ? Dans une affaire qui a fait
l'objet d'une réponse à question écrite, la FIFA avait
mis en place un nouveau système de licences pour les
équipementiers fournisseurs de ballons de football.
Sur les ballons, à côté des mentions " FIFA approved
" et " FIFA inspected " une troisième mention était
introduite : " International MatchBall Standard ".
Tous les ballons utilisées dans les compétitions organisées
par la FIFA et dans les compétitions internationales
organisées par les confédérations continentales devaient
obligatoirement porter l'une des trois mentions. L'obtention
de l'une des mentions présupposant la réussite d'une
série de tests.
Les fabricants qui souhaitaient pouvoir utiliser la
mention " FIFA approved " ou " FIFA inspected " devaient
conclure un accord de licence d'une durée de 4 ans
avec la FIFA et payer une redevance, respectivement
de 1 à 2 Francs suisses ( 8 FF ) par ballon à la FIFA.
Existe t-il une réelle possibilité de choix ?
Il est clair qu'il ne sert à rien de choisir la mention
" International Matchball Standard " lorsqu'on sait
que le concurrent qui choisira l'une des 2 autres mentions
aura une exclusivité de 4 ans avec la FIFA pour les
compétitions que celle-ci organise. Cela est d'autant
plus contestable quand on sait que l'exclusivité n'est
accordée que sur la base du seul critère financier
: le fournisseur qui ne peut payer une telle redevance
ne pourra faire partie des fournisseurs exclusifs de
la FIFA. Il devra se contenter de la mention " International
Match Ball Standard " qui le servira peut-être pour
les compétitions organisées par les confédérations
continentales.
La FIFA ayant le monopole de fait des compétitions
internationales de football, n'y aurait t-il pas là
un Abus de Position Dominante de sa part ?
réponse à question écrite n° E-0845/96 JOCE n°322
L' imposition par les fédérations, de produits, services
ou équipements à leurs adhérents est-elle restrictive
de concurrence ?
La FDT (Fédération Danoise de Tennis) avait conclu
des accords de parrainage exclusifs avec 2 distributeurs
danois de balles de tennis. Dans son magazine la FDT
avait expressément interdit l'utilisation de balles
de tennis autres que celles sélectionnées, et si un
match organisé par le FDT était disputé avec de telles
balles il était déclaré perdu d'avance pour la partie
ayant proposé leur utilisation. Cette décision ne conduisait-elle
pas à stopper l'importation parallèle de balles de
tennis de même nature au Danemark, cloisonnant ainsi
le marché européen ?
Communication Comm. 9 mai 1996 JOCE n°C 138
le parrainage de produits sans relation directe avec
le sport
Un fournisseur de produits sans relation directe avec
le sport risque t-il être écarté du marché en raison
d'une exclusivité accordé à un autre fournisseur concurrent
(exemple du parrainage de la Peugeot 106 Rolland Garros)
? I l est pourrait être soutenu que non. Car le fournisseur
en question à toujours la possibilité de se rabattre
sur d'autres disciplines sportives prêtes à être parrainées.
La concurrence entre fédérations
Ici peut se poser le problème des Pratiques des fédération
visant à entraver préventivement l' apparition de toute
autre fédération distincte ou concurrente pour une
variante d'un sport (ex: fédération de football et
fédération de football en salle). Ces pratiques consisteraient
par exemple à imposer aux sportifs de ne participer
qu' aux manifestations organisées par la fédération
à laquelle ils sont affiliés. De même pour les arbitres
affiliés à la fédération de football par exemple ne
pouvant arbitrer des matchs en salle. On ne peut que
voir dans cette pratique un abus de position dominante
des fédérations traditionnelles.
projet de décision de la commission (IV/34.165-LFFS
c/URBSFA, mesures provisoires)
Les indemnités de transfert & regroupement de clubs
Le principe et l' arrêt Bosman
Le principe, institué en 1960 par l' UEFA, était que
lorsqu' un joueur en fin de contrat, désirait changer
de club, le nouvel employeur devait verser une indemnité
à l' ancien employeur. Les transferts internationaux
étaient subordonnés à l' octroi d' un certificat de
transfert par la fédération attestant que les formalités
et l' indemnité de transfert avaient été respectées.
A défaut de paiement de ces droits, le joueur employé
ne pouvait participer aux compétitions officielles.
Le fondement de cette pratique résidait dans la formation
dispensée, souvent gratuitement, par l'ancien club
au joueur.
L' affaire Bosman a renversé le système au nom de la
liberté de circulation mais n' a pas examiné l' aspect
en droit de la concurrence. Cependant si cet arrêt
interdit les indemnités de transfert dans l' UE/EEE
et confirme la libre circulation des joueurs, comme
l' avait pressenti l' avocat général dans l' arrêt
Bosman, il est clair que le droit de la concurrence
était ici aussi concerné :
Les clubs sont des Entreprises. L' effet est anticoncurrentiel
puisque restreignant les relations économiques entre
Etats membres. La concurrence entre les clubs sur le
marché de l' engagement des joueurs étant par ailleurs
largement restreinte.
Les risques anticoncurrentiels persistant après l'
arrêt Bosman
Même si ce système à été remis en cause en tant que
tel, il demeure un certain nombre de risques anticoncurrentiels
dans ce domaine:
- Les systèmes nationaux de transfert (à l' intérieur
des Etats membres) demeurent et empêchent donc les
clubs d' embaucher les joueurs de leur choix.
- Les systèmes de transfert demeurent dans l' UE/EEE
pour les joueurs de pays tiers non liés à l' UE .
- L' indemnité de transfert demeure possible, dans
le silence de l' arrêt pour les joueurs désireux de
quitter leur club en cours de contrat !!!
Regroupement de clubs : accord entre Entreprises
Une " Superligue " regroupant une élite de clubs européens,
ne constituerait-elle pas un accord entre Entreprises
susceptible de relever de l'article 81CE ? Sur la base
des critères et des conditions de sélection retenus,
les clubs exclus de la " Superligue " pourraient s'estimer
victime d'une entente ayant dès lors pour effet de
restreindre la concurrence. En ce sens, le système
de l'UEFA n'est lui-même pas à l'abri de toutes critiques.
La Commission est d'ailleurs déjà saisie d'une affaire
ayant trait à la question, à la suite de la décision
de l'UEFA, de refuser l'accès aux coupes d'Europe aux
vainqueurs de la Coupe Coca Cola organisée par la Ligue
anglaise de football.
résolution sur l'UEFA et sa coupe Coca-Cola, 14 janv.
1998 : JOCE n° C 34, 2 févr.1998
|